7 Octobre 2007
Les Banû Amghâr n’avaient jamais acceptés la main mise des Almohades sur les Masmûda. Leur influence au milieu des Sanhâja d’Azemmour avait démuni avec la mise en place des institutions almohades. La région de Doukkâla représentait l’opposition à la propagande almohade, de ce fait, les Banû Amghâr ont subi un encerclement à cause de la doctrine d’Ibn Tûmart qui mettait en avant le mahdisme. Cette doctrine suprême ne laisse pas la place au waliy au sein du paysage politique du Maghrib almohade. Les sources n’apportent rien sur l’état des relations entre l’institution de Tît et les Almohades. Le texte le plus important est le rescrit d’Abû Dabûs en 665 de l'hégire qui dépasse dans sont contenu tous les rescrits jusqu’ici attribué à la ta’ifa des Banû Amghâr. Sur le plan de la reconnaissance, le texte reconnu le sharafribât de Tît, ainsi que leur conduite religieuse pieuse. Le calife avait reconnu la wilâya spirituelle et symbolique des Banû Amghâr.
Les privilèges de soutien que le calife Abû Dabûs avait donné à la famille Banû Amghâr était dû à la politique de rapprochement entre le ribât de Tît et les autorités de Marrakech. Le calife almohade, en difficulté militaire à cause des rebellions de la région des Sanhâja d'Azemmour, espace de l’influence des Banû Amghâr, était un espace très sensible puisqu'il constitue le centre des convoitises mérinides. La rébellion de cAzûz b. Yarbûq, le chef des Sanhâja d’Azemmour contre l’autorité almohade et sa déclaration d’allégeance aux mérinides ont joué favorablement dans l’obtention de ces privilèges. Dès qu'Ibn Yarbûq avait perdu la bataille militaire, il s’est réfugié au ribât de Tît en demandant l’amân de son shaykh. Les Almohades ont franchi l’enceinte du ribât, ce qui avait provoqué une crise ouverte entre le shaykh de Tît et les autorités almohades. Pour ne pas ouvrir un front de plus le calife avait essayé de calmer le shaykh de Tît par ce rescrit Il n’est pas surprenant que les Banû Amghâr de Tît était au côté des Mérinides et au sein des enjeux politiques. Les Mérinides ont soutenu l’émir almohade Abû Dabûs dans sa révolte contre al-Murtadâ, ce soutien coïncide avec l’affaire de la transgression de la hurma (transgression du lieu sacré du ribât) par le commandant du calife almohade al-Murtadâ, Abû al-Qâsim al-hanâ’î. Dès que le calife Abû Dabûs s’est retourné contre ces alliées mérinides, il n’avait pas oublié les Banû Amghâr et leurs influences dans la région. Dans un contexte historique très difficile pour les Almohades, les Banû Amghâr ont choisi le camp des vainqueurs, les Banû Marîn, malgré le rescrit d’Abû Dabûs. Ce fait historique montre l’importance des ribats du sud du Maghrib occidental dans le parcours politique et militaire des dynasties. Ce lieu ou une famille comme les Banû Amghâr ont joués un rôle important dans le soutien populaire à tel ou telles dynasties ou mouvements.
En remarque d’après ces exemples, que les structures d’un mouvement collectif étaient très élaborées à l’époque des Almohades, en comparaison avec ce signalait par les sources concernant la période almoravide. Le ribât n’avait pas les mêmes fonctions, puisqu'il avait glissé vers la fonction d’appartenance à une voie initiatique liée au maître. Le ribât lié en particulier à la guerre sainte à ces débuts au Maghrib s’est transformé en un groupe social influant. Il avait fonctionné au sens de ribât spirituelle et communautaire. Le changement opérait à l'époque almohade allait influencer l’histoire du soufisme des dynasties successives, jusqu'à nos jours. Désormais, le waliy du Maghrib occidental n’était plus en retraite individuelle, mais plutôt collectif avec ces disciples et les masses populaires qui croient en la sainteté de cet homme et sa baraka indispensable pour protéger sa vie quotidienne et sa cité des malheurs de la vie. Le waliy à l’époque des Almohades avait repris du terrain au juriste faqîh dans plusieurs domaines de la vie de la cité. Il est désormais un personnage d’envergure malgré l'hostilité des traditionalistes et les craintes des autorités politiques. Les Mérinides ont hérité cette situation avec laquelle il allait composer pour garder le pouvoir au sein de l’espace du Maghrib, qui s’identifie de plus en plus à une sainteté qu’à la tribu proprement dite.