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Histoire du Maghreb تاريخ المغرب الكبير

Au origine du chi'isme fatimîde au Maghreb

Abou-'Obeïd-Allah-ech-Chii fut le véritable fondateur de ce gouvernement. Ses autres noms étaient : El-H'usseïn-Ben-Ah'med-ben-Moh'ammed-ben-Zakaria. Il était de Sena', d'autres disent de K'oufa. Il avait embrassé les opinions de Ben-H'oucheb, qui l'envoya dans le Mor'reb. Il se rendit d'abord à la Mecque à l'époque de l'arrivée des pèlerins. Là, il fit connaissance avec quelques Mor'rebins de Ketama, et, comme il avait quelques notions sur la famille du prophète et qu'il en parlait assez bien, il leur plut par sa conversation animée. Ces hommes l'interrogeaient sur ses projets ; il leur dit qu'il avait l'intention d'aller en Égypte pour s'instruire ; alors ils l'engagèrent à faire route avec eux jusque-là.
Lorsqu'ils furent arrivés tous ensemble en Égypte, et qu'il fallut songer à se séparer, les Mor'rebins, qui s'étaient extrêmement attachés à 'Obeïd-Allah, en éprouvèrent de la peine, et lui dirent que, s'il ne voyageait que pour s'instruire, il ferait tout aussi bien de venir avec eux dans le Mor'reb. C'est ce qu'il fit, et il continua de marcher avec eux, sans leur communiquer ce qu'il avait dans le coeur. Chemin faisant, il prit d'eux toutes sortes de renseignements sur leur pays, de manière à connaître tout ce qu'il voulait savoir. Lorsqu'ils furent arrivés, les Mor'rebins se disputèrent à qui lui offrirait l'hospitalité ; ils furent même sur le point de se battre ; mais 'Obeïd-Allah les mit d'accord en disant qu'il voulait arriver à Fedjel-Akiar, et il les interrogea sur cette localité. Ils en furent étonnés, car c'était la première fois qu'il leur en parlait. Il promit de revenir les voir, chacun en particulier, et ils le laissèrent partir. Ils ne le connaissaient que sous le nom d'Obeïd-Allah-el-Mecherk'i. Il partit le Ier de rebi'-el-oouel 280. Les Berbères vinrent de tous côtés se ranger sous son obéissance.
C'était du temps d'Ibrahim-ben-Ah'med-el-Ar'lâbi. Ce prince dédaigna 'Obeïd-Allah, qu'il crut au-dessous de ce qu'il entreprenait. Mais plus tard Zïâdet-Allah, voyant que son parti prenait de la consistance, qu'il s'était emparé de Tahart, et que les Berbères accouraient à lui de toutes les vallées, fi t marcher des troupes qui furent battues. Après quelque temps Zïâdet-Allah, voyant qu'Obeïd-Allah prenait chaque jour de nouvelles forces, s'enfuit en Orient avec sa famille et ses trésors, comme je l'ai déjà dit. 'Obeïd-Allah, ayant appris sa fuite, quitta la ville de Hiba, où il se trouvait avec mille cavaliers arabes de Ben-Ioucef-ben-Abi-Khanzir, et se porta sur Rekkâda, en faisant observer à sa troupe la plus exacte discipline. Les gens de K'aïrouân se portèrent à sa rencontre pour le féliciter de sa victoire. Il entra à Rekkâda le Ier de redjeb 296. Le vendredi étant arrivé, il écrivit à l'imam de la mosquée, pour lui indiquer ce qu'il devait dire en chaire, et pour qui il devait faire la prière. Il fi t graver sur la monnaie, d'un côté, «J'ai accompli les décrets de Dieu,» et de l'autre : «Les ennemis de Dieu sont dispersés.»
Lorsqu'il vit que son entreprise réussissait, et que le pays lui obéissait, il prit pour son lieutenant son frère El-'Abbas, qui s'était réuni à lui, quitta Rekkâda le Ier de ramad'ân 296, et se dirigea sur Sedjelmâça. L'Ouest en fut ému, les Zenata en furent épouvantés, et les Berbères lui demandèrent l'aman.
Lorsqu'il fut près de Sedjelmâça, El-Issah'-ben-Med'rar, qui en était gouverneur pour les Beni-Ar'lâb, apprit son arrivée. Zïâdet-Allah lui avait écrit au sujet d'El-Moh'di, fils d'Obeïd-Allah, qui s'était rendu dans son pays. El-Issah' envoya chercher l'homme qu'on lui disait être El-Moh'di, et qui l'était en effet; mais celui-ci nia son identité. Il était arrivé à Sedjelmâça déguisé en marchand, et personne ne l'avait reconnu ; mais à l'approche d'Obeïd-Allah, El-Issah' le fi t mettre en prison. 'Obeïd-Allah écrivit pour demander sa mise en liberté, mais il ne put rien obtenir ; alors il eut recours aux armes. El-Issah', fut vaincu après un combat d'une heure, et prit la fuite. 'Obeïd-Allah s'empara de Sedjelmâça, tira de prison son fils El-Moh'di, et lui fi t amener un cheval. Tout le monde remonta ensuite à cheval. Les chefs des Kabiles entouraient El-Moh'di. 'Obeïd Allah pleurait de joie et disait, « Celui-ci est mon maître et le vôtre ! » car il avait résolu de lui céder le commandement. El-Moh'di fut installé dans une grande tente qu'on lui avait préparée, et 'Obeïd-Allah se mit à la poursuite d'El-Issah'. Il le prit, le promena devant l'armée et le fi t mettre à mort, après l'avoir soumis à la bastonnade.
Abou-'Obeïd-Allah entra dans le Mor'reb, à la tête de deux cent mille hommes, infanterie et cavalerie. El-Moh'di resta encore quarante jours à Sedjelmâça et se dirigea ensuite vers l'Afrique. Il arriva à Rekkâda le jeudi 20 de rebi'-el-akher 297, et descendit dans un des palais de la ville. Les autres palais et maisons furent partagés entre les troupes. El-Moh'di se fi t reconnaître partout, et ordonna que son nom fût proclamé dans les chaires ; il fit des lois ; enfin, il exerça tous les droits de la souveraineté. On lui donna le titre d'êmir-el-moumenîn. Cette même année vit la chute de trois dynasties, savoir celle des Beni-Med'rar à Sedjelmâça, dans la personne d'El- Issah', après cent soixante ans de durée ; celle des Beni-Restam, à Tahart, après cent trente ans ; et enfin celle des Beni-Ar'lâb après cent douze ans. Tout revient à Dieu, c'est le plus infaillible des héritiers.
IBN ABÎ DÎNAR al-QAYRAWÂNÏ, Histoire de l'Afrique
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