Vers la fin de son règne Abû Yûsuf al-Mansûr (1184-1199) ordonna aux juifs habitant le Maghreb de se différencier
du reste de la population par une mise particulière, consistant en vêtements bleu foncé pourvus de manches si larges qu'elles tombaient jusqu'aux pieds, et, au lieu de turban, en une calotte de
la plus vilaine forme qu'on aurait prise pour un bât et qui descendait jusqu'au-dessous des oreilles. Ce costume devint celui de tous les Juifs du Maghreb et le resta jusqu'à la fin du règne de
ce prince et au commendement de celui de son fils Abû cAbd Allâh al-cÂdil (1224-1227). Celui-ci le modifia à la suite de démarches de toutes sortes faites par les Juifs, qui recoururent à
l'intercession de tous ceux qu'ils croyaient pouvoir leur être utiles. Abû cAbd Allâh leur fit porter des vêtements et des turbans jaunes et tel est leur costume qu'ils portent encore en présente
année 621 H/ 1224 ap.J.C. Ce qui avait engagé Abû Yûsuf à prendre cette mesure de leur imposer un vêtement particulier et distinctif, c'était le doute qu'il nourrissait touchant la sincérité de
leur islamisme: "Si, disait-il, j'étais sûr qu'il fussent réellement musulmans, je les laisserais se confondre avec les Musulmans par mariage et de toute autre manière; mais si j'étais sûr qu'ils
fussent infidèles, je ferais tuer les hommes, je réduirais leurs enfants en esclavage et je confisquerais leurs biens au profit des fidèles".
AL-MURRÂKUSÎ cAbd al-Wâhid, al-Mucgib fî talhîs ahbâr al-Maghrib (Histoire des Almohades), trad., par FAGNAN Edmond, Adolphe Jourdan, Alger, 1893, pp., 264-265.